Le vaccin de Moderna a été testé sur des milliers de volontaires avant d’être approuvé

Selon Moderna, les personnes vaccinées sont bien des cobayes, affirme un internaute sur Facebook (archivé ici). A l’appui, l’enregistrement d’un appel téléphonique avec un supposé représentant de la compagnie, diffusé dans une émission de télévision américaine.

Évaluation

Le vaccin de Moderna a été testé sur des dizaines de milliers de volontaires avant d’être commercialisé. Bien que les vaccins contre le Covid-19 aient bénéficié d’une procédure accélérée en raison de l’urgence de la situation, ceux-ci doivent répondre aux mêmes exigences que tout autre vaccin. Le fait que des données continuent d’être récoltées ne remet pas en cause leur sécurité, et ne veut pas non plus dire que les personnes vaccinées sont des cobayes. De plus, rien ne prouve que la personne présentée comme un employé de Moderna travaille bel et bien pour la compagnie.

Faits

Dans son post, l’utilisateur Facebook partage une publication relayant un extrait d’une émission américaine, le « Stew Peters Show ». Cet extrait a également circulé sur les réseaux sociaux en Belgique. La vidéo originale de l’émission a été publiée le 22 juin 2021 sur le site du média conservateur Red Voice Media.

L’animateur Stew Peters y assure avoir obtenu l’enregistrement d’un appel téléphonique entre un représentant de la société de biotechnologies Moderna et une femme ayant reçu le vaccin. Seulement, il n’y a aucune preuve permettant d’identifier avec certitude la personne en question, qui se présente sous le nom de Gilbert, comme un réel employé de la compagnie.

L’enregistrement est en effet interrompu à des moments clés. Dans la vidéo, on entend d’abord le menu du service client de Moderna (que la dpa a vérifié en appelant le call center), avant que Stew Peters ne reprenne la parole pour expliquer que l’appel a été coupé et qu’un représentant a rappelé la femme qui tentait de contacter la compagnie. L’enregistrement téléphonique reprend ensuite au début de l’entretien entre ces deux personnes, sans signe reconnaissable qu’on a bien affaire à un membre du service client de Moderna. Peu après, lorsque le représentant présumé demande le numéro de la carte de vaccination de la dame ayant téléphoné, l’appel est de nouveau interrompu par une intervention de Stew Peters et reprend plus tard.

Au cours de l’appel téléphonique, le représentant supposé de Moderna explique que les essais cliniques de la phase 3 du vaccin sont toujours en cours. La femme vaccinée demande alors si « tous ceux qui reçoivent le vaccin en ce moment participent donc à l'essai clinique », ce à quoi son interlocuteur répond « à peu près, oui ».

Pour Stew Peters, cela est la preuve que toutes les personnes actuellement vaccinées « font partie d’un essai clinique, d’une expérimentation ». Pourtant, cette affirmation est infondée.

Les trois phases d’essais cliniques standards, effectuées sur des milliers de participants, ont été entamées pour le vaccin de Moderna. Sur le site de la société, on peut voir qu’une « évaluation de suivi des sujets » est en cours pour la phase 1, tandis qu’une « évaluation de l’étude » est en cours pour les phases 2 et 3. Moderna y indique notamment que les participants de l’essai en phase 3 feront l’objet d’une « surveillance continue » s’étalant jusqu’à deux ans. Les détails des différents essais cliniques, ainsi que leur statut, peuvent être consultés sur le site américain ClinicalTrials.gov (pour les phase 1, phase 2 et phase 3).

Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a donné son feu vert le 18 décembre 2020 à une autorisation d’utilisation d’urgence du vaccin de Moderna. Avant cela, la société américaine avait déjà publié de nombreuses données issues des essais cliniques, entre autres les résultats intermédiaires de la phase 1 le 14 juillet 2020, ainsi que la première analyse intermédiaire et l’analyse d'efficacité primaire de la phase 3, respectivement les 16 et 30 novembre 2020. Dans cette dernière publication, Moderna faisait déjà état d’une efficacité de 94,1% de son vaccin contre le Covid-19, sur un groupe de 30.000 personnes.

C’est donc sur la base des données disponibles à l’époque que la FDA a déterminé que le vaccin Moderna se montrait efficace pour prévenir le Covid-19, et que les avantages l’emportaient sur les risques. Moderna a également soumis un plan de pharmacovigilance pour surveiller la sécurité du vaccin, en effectuant notamment un suivi sur le long terme des participants aux essais cliniques – et non des personnes se faisant vacciner en dehors de ces essais, bien que toute réaction potentielle soit signalée et étudiée. Des données supplémentaires sur l'efficacité du vaccin seront aussi générées à partir du suivi ultérieur des participants aux essais cliniques, explique la FDA.

En Suisse, le vaccin de Moderna a été autorisé le 12 janvier 2021 via une procédure d’examen accélérée. « Cependant, les exigences en termes d’efficacité et de sécurité restent les mêmes que lors d’une procédure d’autorisation ordinaire », indique l’Office fédéral de la santé publique suisse (OFSP). Le développement rapide des vaccins contre le Covid-19 s’explique notamment parce que les différentes phases ont été menées en parallèle, plutôt que l’une après l’autre, selon l’OFSP.

Lorsque le fabricant d’un vaccin dépose une demande d’autorisation, tous les résultats obtenus dans les phases 1 à 3 sont examinés. « S’il est possible d'attester de l’efficacité, de la sécurité et de la qualité du vaccin, une autorisation de mise sur le marché pour la Suisse est octroyée. Une étude de suivi est ensuite réalisée sur le long terme. Toutefois, « une vaccination n’est recommandée que si le bénéfice (protection contre une maladie et ses complications) l’emporte largement sur le risque lié à la vaccination », souligne l’OFSP.

Une liste non-exhaustive des publications scientifiques ou communiqués de presse sur le vaccin de Moderna est disponible sur la plateforme suisse d’information sur les vaccinations Infovac.

Sollicitée par la dpa, Moderna n’a pas encore fourni de réaction aux commentaires formulés dans le « Stew Peters Show ». L’émission avait déjà fait l’objet le 21 juin 2021 d’un fact-check par USA Today, cette fois au sujet de fausses allégations selon lesquelles les vaccins contre le Covid-19 seraient magnétiques.