Raisonnement trompeur

Des vagues de chaleur de plus en plus fréquentes

Publié le 3.9.2024, 17:45 (CEST)

Du plus loin qu'on s'en souvienne, les vagues de chaleur ont toujours existé. Mais elles se multiplient sous l'effet du réchauffement climatique. Les statistiques se trompent rarement.

Après une première vague de chaleur estivale fin juillet 2024, la France en a connu une deuxième du 6 au 13 août. Une grande partie de l'Hexagone a été touchée, avec des températures parfois proches de 40°C.

A en croire certains internautes, cet épisode de forte chaleur n'aurait toutefois rien d'exceptionnel puisqu'il serait comparable à celui d'août 2003, avancent-ils dans des publications virales, accompagnées d'une carte de Météo France. « Rien de neuf sous le soleil », raillent-ils, laissant entendre que l'annonce de « canicules » ne servirait qu'à « faire peur » ou « faire du chiffre » à l'aide de titres racoleurs.

Mais ce raisonnement est bien loin de la réalité scientifique.

Évaluation

La comparaison de deux vagues de chaleur isolées n'a aucun fondement scientifique. Il s'agit d'un raisonnement trompeur, qui s'appuie sur une confusion entre météo et climat. Les statistiques de ces dernières décennies montrent que les vagues de chaleur sont de plus en plus fréquentes sous l'effet du réchauffement climatique.

Faits

En faisant le parallèle entre ces deux vagues de chaleur, les publications laissent penser que ces épisodes s'inscrivent dans la norme, avec l'idée sous-jacente que le réchauffement climatique serait une supercherie.

Or ce raisonnement - récurrent dans la rhétorique climatosceptique - est fallacieux.

Météo n'est pas climat

« Il ne faut pas confondre météo et climat », expliquait déjà Sébastien Doutreloup, climatologue à l'Université de Liège, dans ce précédent fact-check de la Deutsche Presse-Agentur (dpa). « La météo, c'est le temps qu'il fait au quotidien, très variable d'un jour à l'autre et dont le ressenti humain est possible, tandis que le climat, ce sont les statistiques du temps quotidien compilées sur de longues périodes (au moins 30 ans) et dont le ressenti humain est impossible. »

Pour établir l'existence de tendances robustes, les climatologues travaillent donc sur le long terme, « sinon l'analyse est biaisée par la variabilité propre du climat », selon Sébastien Doutreloup.

Des vagues de chaleur plus fréquentes

Sur son site web, Météo France précise que le recensement des vagues de chaleur depuis 1947 montre clairement que la fréquence et l'intensité de ces événements a augmenté.

Avant 1989, on observait une vague de chaleur en moyenne une fois tous les cinq ans. Depuis 2000, les années sans vague de chaleur sont rares, rapporte le service météorologique français.

Cette tendance correspond également aux observations du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), en charge d'évaluer les connaissances sur le réchauffement climatique. Pour l'Europe, la synthèse de celles-ci montre que la fréquence et l'intensité des vagues de chaleur ont augmenté ces dernières décennies et devraient continuer à augmenter.

En France, par exemple, la fréquence des vagues de chaleur devrait doubler d'ici 2050, selon Météo France. Le contrôle des émissions de gaz à effet de serre sera déterminant pour leur stabilisation dans la seconde moitié du 21e siècle.

Des records battus d'année en année

Depuis le début des relevés en 1850, les années les plus chaudes ont toutes eu lieu au cours de la dernière décennie (2014-2023).

Parmi celles-ci, 2023 a été de loin la plus chaude jamais enregistrée au monde, avec environ +1,4°C de plus qu'à l'ère préindustrielle (1850-1900), selon plusieurs organisations scientifiques comme la NASA, le programme européen d'observation de la Terre Copernicus ou encore le service de météorologie britannique Met Office, qui ont mené des analyses distinctes.

Sur la même lignée, 2024 pourrait à son tour afficher des températures inégalées, plusieurs records mensuels ayant déjà été battus.

Avec un réchauffement climatique de +1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels, le Giec prévoit des vagues de chaleur plus nombreuses, des saisons chaudes plus longues et des saisons froides plus courtes. A partir de +2°C, l'augmentation des températures affectera encore davantage les écosystèmes, pesant dangereusement sur l'accès à l'eau et à la nourriture et exacerbant les inégalités sociales.

(Situation au 03.09.2024)

Liens

A propos de la deuxième vague de chaleur estivale de 2024 en France - Météo France (version archivée)

Publications Facebook I, II, III (versions archivées I, II, III)

Fact-check de la dpa

A propos du nombre de vagues de chaleur en France - Météo France (version archivée)

A propos des impacts du réchauffement climatique en Europe - Giec (version archivée)

A propos des températures de la dernière décennie - NOAA (version archivée)

A propos de l'année 2023 I, II, III (version archivée I, II, III)

A propos des records mensuels en 2024 I, II (versions archivées I, II)

Différences entre un réchauffement de +1,5 et +2°C (version archivée)

Résumé du rapport spécial du Giec sur un monde à +1,5°C (version archivée)

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